vendredi 1 août 2008

Aventures au Machu Picchu

Le 1er août, le premier jour du Don à Pacha Mama, la Terre-Mère inca, je me lève à 4h45.

Objectif: arriver au sommet du Machu Picchu avant les hordes de touristes afin de profiter de la quiétude du lieu.

Les conquistadors espagnols avaient la fâcheuse habitude de détruire les temples et cités incas soit pour réutiliser les pierres dans leurs haciendas, soit pour détruire toute trace de culte inca.
Le Machu Picchu étant une des seules cités incas que les Espagnols n´aient pas découvert, le site est extrêmement bien préservé.

A 5h, il fait encore nuit, et je progresse donc avec la lampe frontale à travers les rues d´Aguas Calientes. Je passe à côté de la file de touristes déjà réveillés, en train d´attendre la ronde des bus qui commence à 5h30. Eux aussi veulent arriver les premiers, mais sans effort. Moi je continue à pied.


La nuit m´enveloppe, un conducteur de bus rejoignant son engin me rassure sur mon itinéraire en me désignant 400 mètres plus haut une lumière comme étant le Machu Picchu. Je prends la lumière en photo. C´est juste une lumière dans la nuit, mais derrière se cache le Machu Picchu encore invisible.

Sortant du village, je n´ai plus comme compagnons que les étoiles et le croassement des grenouilles. Le chemin qui monte à la cité perdue des incas est fait de marches en pierres et est clairement balisé.

L´ombre projetée par la lampe frontale me donne des hallucinations: j´ai l´impression que le noir de l´ombre au sol est en fait des oeillères que je porte autour des yeux. Pour me gratter l´oeil, mon doigt prend même soin d´éviter cette oeillère imaginaire.

Je suis seul. Les formes montagneuses si particulières du Machu Picchu apparaissent dans la lueur de l´aube ; les grenouilles se taisent et les oiseaux se réveillent.

A 6h, j´arrive sur le site. Beaucoup d'autres touristes sont déjà là, et la plupart se précipitent sur le point le plus élevé du Machu Picchu pour regarder le soleil s´extirper de derrière les cimes, tandis que je rejoins (en compagnie de mon petit déjeuner venu en sac à dos) l´autre extrémité du site. Je sacrifie la plus belle vue à plus de solitude. Le soleil sort et commence à éclairer les sommets enneigés. Puis, petit à petit, le soleil finit par inonder de lumière les maisons et les temples de la Cité Perdue.

Le site est grandiose, escarpé, isolé, fait de coins et de recoins, de temples au soleil et au condor. La vue alentour est incroyable, faite de montagnes en forme de pains de sucre.




C'est suffisamment grand pour pouvoir éviter la plupart du temps les groupes de touristes avec leur guide, mais les endroits les plus remarquables sont envahis par une foule assourdissante.

Au détour d´un chemin, je découvre un escalier ne semblant pas faire partie d´un itinéraire officiel. A la recherche de silence, de solitude, de sensations fortes et d´aventure, je descends les marches, me demandant ce que je vais trouver.

Mais les marches semblent descendre vers la vallée. Vais-je découvrir une sortie secrète? Et donc une entrée secrète (et gratuite - l´entrée au Machu Picchu coûtant 3 jours de vie de routard)?

Je continue de descendre lorsque je croise un ouvrier des ruines:
- Vous devez remonter!
- Pourquoi, n´y a-t-il pas une sortie dans cette direction?
- Non, ce chemin est réservé aux ouvriers. La seule sortie est dans l´autre direction, vous devez faire demi-tour jusqu´au Machu Picchu.
- Entendu, mais avant de refaire la rude montée, je dois me reposer un peu.


Une fois l´ouvrier reparti, je ne remonte pas, mais continue de descendre. Les marches en pierre se couvrent bientôt de terre, puis les marches disparaissent pour devenir un sentier de forêt, puis la forêt devient de plus en plus dense et le sentier de plus en plus escarpé. Mais il y a encore trace de passage humain. C´est donc que ce sentier doit mener quelque part. De plus, la promesse de l´inconnu qui se dresse devant moi m´attire, ainsi que la possibilité d´une découverte d´un chemin interdit. La solitude aussi, et enfin le risque que je doive tout remonter si jamais j´échoue dans ma quête.

Bientôt, le bâton en bois ramassé plus tôt m´aide à progresser à travers le bois en sondant des sols incertains, en fauchant les hautes herbes ou en me donnant un appui lors des dénivelés importants. Je me sens comme un explorateur, un Indiana Jones. Il me manque juste la machette.

Le chemin est de moins en moins matérialisé, mais une trace de passage humain subsiste. Je longe des ruines incas de cultures en terrasse (non encore défrichées). Lorsque je dois désescalader un mur de pierre et de terre de 2 mètres, sur un sol humide et instable, je m´aperçois que le "chemin" est en fait devenu le lit d´un petit ruisseau. Quelques mètres plus loin, un à-pic se profile. Infranchissable. Je dois faire demi-tour. Ré-escalader dans l´autre sens.




Les plantes me griffent, mes forces sont mises à contribution. Je m´entête et prend une nouvelle direction, un nouveau chemin, toujours vers le bas. La rivière dans la vallée en contrebas n´est plus si loin. La sortie secrète est à portée de main:



Je passe par dessus des amas de branches et de terre instables recouvrant des ruines, je saute de rochers en rochers au milieu de hauts roseaux me camouflant l´état du sol. Je fais en sorte que le chemin que j´emprunte soit suffisamment reconnaissable pour pouvoir faire marche arrière en cas d´échec. J´ai surtout peur des bêtes et des plantes (moustiques, araignées, champignons, orties, parasites ...). La forêt est dense puis rapidement inextricable. Je dois choisir mon chemin avec soin. Des ruines incas non encore totalement découvertes me sourient régulièrement.

Puis, à nouveau, le chemin disparait et le dénivelé devient trop important pour pouvoir le descendre sans danger. Echec et mat. La montagne est plus forte que moins.


La flèche rouge: début de ma descente vers la sortie secrète.

En remontant (au prix de beaucoup d´effort ; je me suis même trouvé à court d´eau), camouflé par les arbres, j´observe une vingtaine d´ouvriers défrichant de nouvelles ruines. Je m´approche de l´un d´eux pour lui poser quelques questions. J´apprends ainsi que ces fouilles devraient durer jusqu´à la fin de l´année, et qu´elles seront alors ouvertes au public. Le Machu Picchu est encore plus grand que la partie émergée aujourd´hui visitable!

Revenu au Machu Picchu, exténué, sale, griffé par les plantes, je passe, amusé, devant les touristes qui bronzent sur les cultures en paliers incas, conversant tranquillement entre eux ou avec leur guide. Ils sont tout propre, pas fatigués, tout souriant, contrairement à l´Indiana Jones en herbe que je suis devenu l'espace de trois heures.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Hey Indiana Jones, un ptit coucou et grosses bises de Londres!
Audrey