lundi 9 février 2009

De Praia da Pipa à Olinda

Je commence par 6 km de piste. Ha ben bravo ! Mon vélo tout juste remis à neuf se remet bien vite à crisser avec le sable qui se faufile dans le dérailleur !

Voici quelques exemples de l´état des pistes que j´emprunte:







Dès que l´opportunité pointe son nez, je quitte le bord de mer et reprend les routes asphaltées, afin d´"économiser" le vélo et d´aller un peu plus vite que 9km/h. La côte est fabuleusement belle, mais j´ai eu ma dose de côte et de plage pour au moins pouvoir faire un écart quelques heures.

Effectivement, 4h plus tard, me revoilà sur la piste vers la plage. La route nationale est vraiment trop passante et pas agréable. Finalement, je préfère peiner sur la côte, mais sans voiture et avec de plus beaux paysages.

Infos vélo: de Praia de Pipa à Barra de Camaratuba
Kilomètres du jour: 70
Kilomètres cumulés: 4040
Départ: 8h45
Arrivée: 15h15
Temps sur le vélo: 4h10
Temps sur la route: 7h30
Vitesse moyenne: 17 km/h
Vitesse max: 45 km/h


Départ 8h. Dure journée:
- je commence par prendre un bateau.
- puis je pousse le vélo 5 km sur un chemin ensablé dans les collines.
- ensuite 8 km de piste où je ne dépasse pas le 9 km/h.
- enfin 11 km d´asphalte où je casse, encore, un rayon.
- encore 4 km de piste ensablée.
- je prends de nouveau un canoë, et je participe au ramage.
- toujours de la piste ensablée.

Et là j´arrive sur une plage, nez à nez avec un fleuve qui se jette dans la mer. Mais la mer essaye aussi de se jeter dans le fleuve, du coup l´embouchure est assez mouvementée. Il y a une centaine de mètres d´embouchure. Je vois bien 2 petits canoës plus en amont du fleuve, à 50 mètres, mais pas âme qui vive. Juste une petite paillote qui semble abandonnée.

On dirait que la traversée de l´embouchure peut se faire à pied. J´enfile le maillot de bain et je pars en repérage. Arrivé aux 3/4, je n´ai toujours de l´eau qu´au bassin. Inutile de tester jusqu´à l´autre côté. Ça passe, c´est sûr. Et passer par l´embouchure m´évite de grimper la falaise de l´autre côté du fleuve.

Allez, je prends ma sacoche de guidon en bandoulière, et le sac à dos au dos. Le vélo reste sur la rive pour le moment. Il passera au second voyage. Et c´est parti. J´arrive en effet aux 3/4 sans encombre. Mais là, au lieu de remonter en pente douce, le fond continue de devenir plus profond. L´eau monte jusqu´à la taille. Le sac à dos se mouille. Je le mets alors sur la tête, et je le garde en équilibre d´une main (15 kg ...), tandis que l´autre main maintient la sacoche de guidon (qui contient appareil photo et téléphone portable) hors de portée des vagues.

Plus j´avance et plus il y a de fond et plus les vagues grossissent. Je dois maintenant sauter à chaque vague pour éviter que ma sacoche de guidon ne se mouille.

Je ne suis plus qu´à 15 mètres de l´autre rive. Et c´est la panique. Le bras qui tient le gros sac sur ma tête fatigue. J´avance, mais l´eau continue de monter au lieu de redescendre. Des GROSSES vagues déferlent sans cesse sur moi. Même si je saute, les sacs sont trempés. Je dois faire demi-tour. Je suis épuisé, mais je dois faire 20 mètres dans l´autre sens pour sortir de la zone de vagues plus hautes que moi et reprendre pied. Je saute le plus haut possible à chaque vague en criant avec désespoir "noooon, NOOOOON, NOOOOON !!!" en pensant que mon appareil photo et mon téléphone sont déjà morts. J´arrive finalement sur le sable. Mon sac dos est trempé. Mais ce ne sont que des vêtements. Ma sacoche de guidon aussi, mais je suis étonné de voir que l´intérieur est presque sec. Rien n´a souffert et l´appareil photo marche encore ! Ouf !

Bravo Nico ! Tu veux jouer à Superman, traverser des rivières à pied, et tu te retrouves comme une andouille, au milieu des vagues, avec ton gros sac sur la tête, à pleurer ta mère, et à flipper pour tes biens matériels ! Ça t´apprendra !

Voici l´embouchure que j´ai voulu traverser:
Je reprends des forces, puis je m´approche vers la paillote abandonnée. Elle n´est pas abandonnée finalement: deux bonhommes y font la sieste en attendant le chaland pour le faire traverser en barque, et gratuitement en plus !

Arrivé de l'autre côté, je gravis finalement la falaise, tellement abrupte que je dois monter d´abord les bagages, puis le vélo:
Epuisé, je dois pourtant continuer vers le prochain village, Lucena, par des chemins ensablés qui n´en finissent pas. Un ouvrier en tracteur, sympa, me rapproche de quelques kilomètres:



J´avais un objectif de 100 km aujourd´hui, et je m´arrête à 49 km, épuisé. 11km/h de moyenne sur la journée, c´est symptomatique des journées difficiles !

Heureusement, je traverse des jolis endroits:



A Lucena, un cirque est sur la place du village, alors j´en profite pour retourner en enfance !

Infos vélo: de Barra de Camaratuba à Lucena
Kilomètres du jour: 49
Kilomètres cumulés: 4089
Départ: 8h00
Arrivée: 15h30
Temps sur le vélo: 4h30
Temps sur la route: 7h30
Vitesse moyenne: 11 km/h !!!
Vitesse max: 47 km/h


Mais la journée la plus épique est encore à venir !!

Départ: 5h40 du matin. Arrivée prévue: vers 16h, à Olinda, 160 km plus au sud !
(au final, je m´arrêterai à 133km, mais à 17h40).

Renseignement pris, ce n´est que de l´asphalte tout du long et c´est quasiment plat ! Donc c´est faisable. Ça tombe bien, on est samedi, et je veux arriver à Olinda avant demain, car les dimanches de février, c´est le "pré-Carnaval".

En effet, les 110 premiers kilomètres, ça se passe relativement bien. Uniquement de l´asphalte, des paysages superbes de hauts plateaux et de mers paradisiaques (je commence à être presque blasé ...). Je m´arrête sur la plage pour boire un coca ou une eau de coco, petite baignade, et je repars. Arrêt dans un petit village pour le déjeuner (soupe de fruits de mer, délicieuse).

A ce propos, un constat en traversant les petits villages: quand l´humanité s´ennuie, l´humanité picole. Et quand l´humanité s´ennuie du matin au soir, l´humanité picole aussi du matin au soir. Avec tous les problèmes qui s´ensuivent (alcoolisme, obésité, éventuellement violence ...). Mais pourquoi s´ennuyer? A quoi ça sert ? (question naïve et malicieuse).

Trêve de digression ! Après le déjeuner, ça se corse singulièrement:
L´asphalte disparait, et la piste fait son grand retour. Un troisième bateau me fait passer un nouveau fleuve, et me dépose sur la plage de l´autre côté. J´ai 1 km à faire sur une plage à marée haute, donc en poussant le vélo.

Ensuite c´est à nouveau de la piste ensablée, avec des bifurcations, pas de panneaux, et des habitants qui ne savent pas toujours bien m´expliquer le chemin le plus facile pour aller au prochain bateau (quand ils savent qu´il y a un bateau). Et puis ce n´est pas le bon jour pour faire de la piste. Si je veux boucler les 160 km dans la journée, il me faut de l´asphalte, comme on avait prévu, nom d´un p´tit bonhomme !

Alors qu´il est déjà 17h (la nuit tombe à 17h40), il me reste 30 km jusqu'à Olinda mais un panneau salvateur est planté là: "Terminal de bus". Un guichetier aimable m´offre un café chaud et m´indique qu´un bus part à 17h30. Pour Olinda? Oui, pour Olinda. Je papote, et au bout de 10 minutes, alors que je veux savoir à quel endroit d´Olinda le bus nous dépose, on me fait savoir qu´il y a deux changements de bus pour aller à Olinda. QUOI? Mais vous m´avez dit que ce bus allait à Olinda. Oui, mais en changeant de bus 2 fois. Donc avec 3 bus ! Ha oui ? Ha ben bravo ! A ce compte-là, le bus va aussi à Paris, en changeant 147 fois et en passant par le détroit de Béring ! Grrrrrrr ! 3 bus, c´est 3 fois le prix, c´est 3 fois à attendre, et c´est 3 fois l´incertitude que mon vélo sera pris en soute (s´il y a une soute).

Même s´il est 17h20, je reprends le vélo, et je file, plus vite que le vent, une course contre la nuit. Assez vite, je dois reprendre un nouveau bateau (le quatrième de la journée) avec un pilote atypique:


Puis je zigzague à travers les rues. Ma carte m´indique un ultime bateau (le cinquième!) avant de retrouver l´asphalte, et ensuite c´est 25 km jusqu´à Olinda. Même de nuit, une bonne heure de route, c´est faisable. J´ai le sang chaud, l´envie d´y arriver. Je pédale, à fond, sur la piste.

J´arrive au fleuve. Pas de bac ni de ferry en vue. Un pécheur est en train de quitter le rivage sur son bateau à voile. Je le hèle: "Oye, Amigo, amigo ! Pouvez-vous me faire passer de l´autre côté? Oui ? Pour 2 Reals?" Ouf, ça y est, une fois de l´autre côté, je ne serai plus qu´à 25 km d´Olinda !

Arrivé de l´autre côté, c´est une plage, avec des restaurants sur le sable. La route ne doit pas être loin. "Où est la route, amigo ? Haaaa, pas de route ! Il faut attendre la marée basse et passer de l´autre côté ! Comment ? Pas de route ? Je ne comprends pas."

Il me fait signe de le suivre, on passe entre les tables des restos, on parcourt 50 mètres, et là je comprends: je suis sur une île ! Petite. 50 mètres sur 200 mètres. Ma route asphaltée est à 1km, mais on ne passe qu´à marée basse. J´abdique. Je ne serai pas à Olinda ce soir. On me propose de poser mon hamac sous les paillotes. Le soir, les restos ne fonctionnent pas, mais le personnel dort sur place. "Vous pouvez me faire à manger quand même? Oui, oui, pas de problème". Un énorme plat de pâtes que je finirai au petit-déjeuner le lendemain tellement il est gros.

J´accroche mon hamac et je papote un peu avec le personnel. Il y a quelques adultes, 1 enfant de 15 ans et deux de 9 ans. Les enfants travaillent 6 jours par semaine pendant les 2 mois de vacances d´été (ben oui, c´est l´été ici), sans loisirs puisqu´ils dorment sur place. Ils sont payé 20 Réals par semaine pour les enfants de 9 ans, 50 Réals par semaine pour l´ado de 15 ans (mais nourris et "logés" en hamac à la belle étoile). Un adulte est payé 250 Réals par semaine (le smic est à 120 Réals par semaine, soit 40 euros).


Autres tranches de conversations assez surprenantes avec les adultes:
"Alors tu fais du vélo ?
- Oui, oui.
- Tu es venu de France en vélo ?
- Heu ... non, il y a un obstacle, mineur, certes, mais néanmoins présent: l´Océan Atlantique!
- Ha, oui ... et donc tu es venu comment?
- Heu ... en avion, pardi !
- Haaaaa, en avion ! Il est venu en avion !"

Tu m´étonnes. L´avion pour eux c´est presque de la science-fiction. Déjà que la plupart ne sont pas capables de me dire si à 20 km de chez eux, plus au sud, je vais trouver (ou pas) un service de ferry/bac régulier, alors l´avion ... Ironiquement, l´île s´appelle (je crois) La Couronne de l´Avion.

Rien à voir, mais Jésus existe, il pêche tranquillou au large de l´île de Coroâ do Avião, pas sur son bateau, mais à côté !!:

Infos vélo: de Lucena à Ilha Coroâ do Avião.
Kilomètres du jour: 133
Kilomètres cumulés: 4222
Départ: 5h40
Arrivée: 17h40
Temps sur le vélo: 7h40
Temps sur la route: 12h00
Vitesse moyenne: 17 km/h
Vitesse max: 71 km/h



Levé sans réveil, avec le soleil, un bon petit-déjeuner de pâtes dans le ventre, je traverse à marée basse. Puis après un ultime bateau, je me retrouve les 2 roues sur l´asphalte pour une petite promenade de 25 km jusqu´à Olinda.


Mon vélo, qui était remis à neuf il y a 3 jours, est à nouveau plein de sable, de sel, déréglé, roue voilée, un rayon cassé, la béquille ne coulisse plus, et le pédalier a du jeu !!!


Infos vélo: de Ilha Coroâ de Avião à Olinda
Kilomètres du jour: 25
Kilomètres cumulés: 4247
Départ: 7h20
Arrivée: 10h20
Temps sur le vélo: 1h40
Temps sur la route: 3h00
Vitesse moyenne: 15 km/h
Vitesse max: 33 km/h


Olinda est une ville coloniale très jolie qui a la particularité d´être au bord de la mer, par rapport à toutes les autres villes coloniales que j´ai visité, entourées de montagnes.

Je débarque en plein pré-Carnaval, du monde partout, de la musique, de la capoeira, sympa !

Je crèche à la Pousada d´Olinda, très sympa, tenue par un marocain, avec piscine, hamacs et un énorme buffet au petit-déjeuner. En plein dans le centre, pour 8 euros, buffet inclus (prix négocié) - je recommande ! :-)

En plus, un petit compagnon est le gardien de ma chambre:




Le lendemain, je fais encore remettre mon vélo à neuf: rayon remplacé, roue dévoilée, pédales dégrippées, axe du pédalier changé. Je vais éviter de faire trop de vélo-tout-terrain-plage dans les prochains jours !!

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